[Interview] Nathalie Ducros : « Traiter le sujet du handicap de la manière la plus transversale possible »


L’Agefiph collecte les contributions des entreprises privées ne remplissant par leur obligation d’emploi de travailleurs handicapés et propose conseils, accompagnement et aides financières aux personnes handicapées et aux employeurs. Nathalie Ducros, déléguée régionale de l’Agefiph, revient sur les nouvelles orientations de l’association et ses actions en Île-de-France.

Quelle est la situation des travailleurs handicapés en Île-de-France ?
Entre juin 2015 et juin 2016, on constate en Île-de-France une augmentation du nombre de demandeurs d’emploi en situation de handicap de 7,1 % contre 1,3 % pour l’ensemble de la population. Un chiffre à mettre en regard du niveau de formation initiale : 62 % des personnes handicapées ont des niveaux infra-bac, contre 40 % pour le « tout public ». Dès l’école, le parcours des personnes handicapées se révèle souvent plus complexe. Elles ont à la fois plus de mal à entrer sur le marché du travail et davantage de difficultés à y revenir après une rupture dans leur parcours. Elles sont aussi plus touchées par les aléas économiques. Par ailleurs, il faut savoir que seules 15 % des personnes handicapées le sont de naissance. C’est donc 85 % des personnes qui ont un handicap « acquis », lié aux accidents de la vie – y compris au cours de leur travail – à la maladie ou au vieillissement. Nous sommes donc tous potentiellement concernés et il y a un enjeu de prévention, d’anticipation et d’identification de ces situations qui peuvent potentiellement amener à des ruptures dans le travail. Au-delà de notre offre de services, nous souhaitons donc intervenir davantage en prévention.

Quelles sont les nouvelles orientations stratégiques de l’Agefiph ?
Les grandes ambitions ont été arrêtées en juin 2016. Nous élaborons actuellement le plan stratégique pour une déclinaison opérationnelle début 2017. Cinq ambitions générales ont été définies : la sécurisation des parcours professionnels, l’accès à la formation de droit commun, la mobilisation du monde économique, la coopération entre les acteurs et la visibilité et la lisibilité de notre action. Notre enjeu est que le sujet du handicap soit traité de la manière la plus transversale possible.

Quelles actions l’Agefiph met-elle en place en Île-de-France ?
Sur le champ de la mobilisation des acteurs, nous activons tous les réseaux d’influence et d’information pour démultiplier la sensibilisation : nous mobilisons les organismes de formation, les centres d’apprentis, les relais auprès des grandes entreprises et des PME, les OPCA, mais aussi les prescripteurs, comme les référents des missions locales, etc. Nous animons également un réseau de plus de 300 référents handicap d’entreprises, qui permet de brasser les bonnes idées et pratiques. Avec la Direccte des Hauts-de-Seine, nous expérimentons par ailleurs un « parrainage », un accompagnement des PME qui souhaitent s’engager dans une politique d’emploi ou construire un accord handicap. De manière générale, il nous faut aller vers une plus grande professionnalisation des acteurs de droit commun. Dans le cadre du Service public régional d’orientation (SPRO), nous avons ainsi construit un module de sensibilisation au handicap à destination de tous les opérateurs du Conseil en évolution professionnelle (CEP) : Pôle emploi, Cap emploi, missions locales, OPACIF et Apec. Nous avons également un objectif de renforcement de notre présence territoriale. 24 bassins d’emploi viennent d’être définis par l’État et la Région Île-de-France, pour mieux répondre aux besoins des entreprises, des salariés et des demandeurs d’emploi au plus près du territoire. L’Agefiph Île-de-France va ainsi s’appuyer, dans le cadre de son partenariat avec la Région, sur les délégués territoriaux du Conseil régional pour intervenir en amont des projets structurants pour le territoire.

Comment mobilisez-vous les partenaires sociaux ?
Il me semble indispensable de renforcer nos actions communes avec les partenaires sociaux, qui sont des relais de premier plan dans l’entreprise. Cela passe notamment par un meilleur outillage des équipes syndicales ainsi que des RH. Au-delà de la négociation d’accords handicap, il y a aussi à progresser dans les instances comme les CHSCT et les CE. Il existe des moments charnières dans un parcours, comme lorsque le handicap s’aggrave, quand on cherche une reconversion professionnelle ou qu’il faut envisager un reclassement hors de l’entreprise. Dans ces situations, l’Agefiph doit développer sa capacité et son agilité d’intervention. L’offre est aujourd’hui très liée au statut des personnes – en emploi versus sans emploi – et pas assez aux besoins exprimés.

 

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